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IRÈNE ET LES EUNUQUES

Après avoir répondu à un signe du dehors, un marin s’approcha de lui :

— Rayon du Christ, souffre ma parole. Voici le vent favorable ; et, si tu ne le défends pas, les matelots vont hisser les vergues de la galère impériale.

À ces mots, les eunuques, Irène se regardèrent ; et leurs yeux se signifièrent qu’ils devinaient exactement la qualité du voyageur. Mais elle le laissa dans son trouble, et attendit qu’il parlât.

Nicéphore se décida :

— Je te salue, Très pieuse maîtresse des Romains.

— Ne mets pas une ironie indigne de nous dans ton discours,… répondit-elle, hautaine et simple.

— Est-ce de l’ironie ? Sept mois viennent de s’écouler depuis l’heure où, malgré moi, je fus porté à l’empire par les ennemis de tes eunuques. Et cependant je balbutie… : je demeure sans voix, quand j’approche.

La tristesse orgueilleuse d’Irène lui reprocha :

— Toutefois, tu m’as reléguée à Lesbos, tu m’as pris les trésors d’Éleuthérion, tu m’obliges à filer comme une pauvre femme pour gagner le pain de chaque jour…

— Byzance est pauvre, l’ennemi pressant, le Sénat cupide. Je n’ai pas les mérites indispensables pour obtenir d’eux ce que je voudrais te donner ; et je dus obéir à la voix publique réclamant ton exil… Je suis un humble serviteur : une oreille pour entendre. Ne me condamne pas.