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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/12

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

pelait le « capitaine bleu », à cause de la couleur du parement de ses soldats.

Les troupes se composaient des deux compagnies du commandant Bernard et du capitaine Coumès, de six autres compagnies franches organisées dans les Vosges sous le nom de « Chasseurs de la Délivrance », des chasseurs du capitaine Magnin et des francs-tireurs de la Meuse du capitaine bleu. Il y avait encore un peloton d’éclaireurs à cheval, formé d’anciens cavaliers de l’armée du Rhin, et enfin un bataillon de mobiles du Gard, envoyés de Langres, et qui avaient rallié le camp depuis peu de jours. — Douze cents hommes en tout.

Marchant presque toujours à travers bois, la colonne s’avançait vers le nord. Le péril était grand surtout à partir de Chatenoy, situé entre Neufchâteau et Mirecourt, villes occupées par l’ennemi, dont les patrouilles parcouraient les campagnes environnantes.

L’expédition était servie par la nuit noire, la neige épaisse, le froid intense, les terrains boisés et difficiles ; elle réussit à dépasser les bois d’Attigneville, et fit une halte à la ferme de la Hayevaux où un gîte lui avait été préparé. Les hommes exténués par une marche forcée de quatorze heures à travers les bois, sur un sol accidenté, couvert de neige et de verglas, n’avaient plus même la force de manger. Un certain nombre de mobiles du Gard, éclopés déjà, semblaient destinés à demeurer forcément en arrière.

Les chefs décidèrent de les renvoyer au campement, ainsi que les soldats qui, ne possédant pas toutes les qualités requises, ne pouvaient que compromettre la réussite de l’entreprise. Une colonne trop forte, moins aisément dissimulable à travers le pays qu’il s’agissait de traverser, augmentait les chances d’insuccès. Dès les premiers pas, on s’apercevait que pour un coup de main comme celui qu’on allait tenter, il ne fallait que des hommes alertes, intrépides, familiers avec les ruses de la guerre de partisans, rompus à toute fatigue.

Réduite à deux cent cinquante hommes, dont deux cents combattants, la colonne expéditionnaire se remit en mouvement le 20, à neuf heures et demie du soir ; mais les difficultés augmentaient. En abandonnant les routes connues pour s’acheminer par des chemins de traverse peu fréquentés, on risquait à tout moment de s’égarer et de tomber au milieu de patrouilles qui auraient promptement donné l’alarme. On redoubla donc de précautions dans l’ordre de marche. Un groupe d’éclaireurs à cheval prit les devants ; quelques-uns, munis de lanternes à feux blancs et rouges, devaient faire des signes