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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/22

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ii

La colonne fit ses préparatifs de départ.

On n’avait plus besoin des éclaireurs à cheval. Ils furent renvoyés au camp. Les charrettes devenaient un embarras. Il fallut les abandonner et charger la poudre sur des chevaux.

La petite troupe ainsi allégée se remit en marche, évitant les villages et choisissant de préférence son chemin sur les points les plus inaccessibles de la région.

Les gorges succédaient aux gorges, les collines aux collines, aux crêtes où s’enchevêtraient les sapinières ; les vallées descendaient en s’élargissant vers la Moselle ; au loin, sur l’extrême droite, se profilaient les sombres lisières des forêts à perte de vue, se creusaient des vallées, bout à bout, s’ouvraient des cols dans de hautes altitudes. On devinait de ce côté les géants du massif des Vosges, le Honeck, le Donon, le Prancey, transformés en glaciers dont l’âpreté de l’air rapprochait la distance…

Et toujours de la haute et de la basse futaie, des taillis et des broussailles, des roches granitiques, des torrents avec leurs fragiles ponts de bois. Parfois, au-dessus du chemin taillé à mi-côte, surplombait un ancien château, le lierre, les ronces, les houx touffus s’étageant le long de la roche ; ou les pentes boisées que l’on côtoyait semblaient servir d’encadrement à une maison forestière, surgissant nettement avec sa haute toiture en auvent, percée de petites lucarnes à tabatière, sa galerie à balustrade découpée à jour, ses cheminées de briques rouges. Les bois, naguère retentissant sous les coups secs de la hache des bûcherons, demeuraient silencieux ; nulle part la fumée blanche des charbonniers à l’œuvre dans le taillis.