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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/311

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

l’hôtel du Bourgtheroulde, où une jolie tourelle en encorbellement est suspendue à l’encoignure de la façade méridionale.

Barbillon tenait beaucoup à montrer l’Hôtel-de-Ville « de sa tante ». Il entraîna Jean devant un édifice d’extérieur moderne attenant au transept septentrional de l’église Saint-Ouen, et qui a été le dortoir des religieux de l’abbaye ; la façade principale se compose de deux pavillons parallèles à chacune des extrémités, et au milieu d’un péristyle soutenu par d’élégantes colonnes. Le grand escalier se distingue par la hardiesse de sa coupe ; l’escalier volant du milieu est d’une élégance et d’une légèreté admirables.

En quittant l’Hôtel-de-Ville, ils entrèrent dans l’ancienne église abbatiale de Saint-Ouen, par le grand portail de l’ouest, récemment reconstruit en entier, et qui s’ouvre entre deux tours pyramidales presque aussi élevées que la tour centrale. Jean, qui avait le sentiment du beau, aussi bien que le sentiment de l’honnête, demeura saisi de surprise au milieu de cette nef aérienne dont l’ordonnance, d’une simplicité extrême, allie tant de puissance à tant de grâce.

Cette église, la merveille de Rouen, et aussi l’un des plus parfaits édifices gothiques de l’Europe entière, est surmontée à son centre d’une magnifique tour de soixante-seize mètres de hauteur, dont la partie supérieure de forme octogone, terminée par une couronne ducale, finement travaillée à jour, est flanquée de quatre tourelles qui se rattachent aux angles par de légers arcs-boutants.

À l’extérieur, cette splendide création de l’art gothique est entourée de trois côtés par un beau jardin dont les ombrages et les parterres recouvrent une vaste nécropole et les débris d’un temple romain : là est le centre de la ville actuelle.

Après avoir bien admiré, les deux jeunes garçons descendirent jusqu’au pont de pierre, qui est situé à la pointe occidentale de l’île Lacroix, et forme deux parties, chacune de trois arches. Du terre-plein où s’élève la statue du grand Corneille, œuvre de David d’Angers, ils jouissaient d’une admirable vue sur la ville et ses environs. Rouen leur apparaissait telle qu’elle est : l’une des principales villes de France par son étendue, la beauté de ses monuments, l’importance de sa population, de son industrie et de son commerce ; jadis capitale de la Normandie, elle tient dignement son rang de chef-lieu de département.

À leurs pieds coulait la Seine, beaucoup plus large et plus profonde qu’à Paris. En avant, se déroulaient à droite et à gauche du fleuve de longues