Aller au contenu

Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/406

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
398
LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

Palais de l’Industrie : c’était là le point lumineux de la vie du bonhomme : Paris ! Aussi après les premiers mots dits à l’occasion de son départ, cessant de soupirer, et essuyant ses yeux d’un revers de main, il releva fièrement la tête et sa haute taille, et dit :

— C’est beau Paris, tu sais ?

Il parlait avec un sentiment d’orgueil bien touchant, ce vieillard dont l’existence tout entière s’était écoulée humblement dans une région extrême de la France et qui n’a pas toujours été française…

Le plaisir de pouvoir parler une fois encore de son Paris consola un peu le père Martin. Quand le jour parut — une matinée noyée dans les brumes d’octobre — le vieux berger avait quitté la ferme, conduit en breack par le fils aîné de la maison.

Quelques heures après Jean et les deux cousins, après de cordiaux adieux, roulaient en « diligence » sur la route d’Esquelbecq où, aussitôt arrivés, ils prirent le chemin de fer pour Bergues.

Cette ville, située à deux lieues de Dunkerque, où aboutit la voie ferrée, est également placée au point de jonction du canal de la Colme avec deux autres canaux se dirigeant vers Dunkerque et vers Furnes. Ceinte de remparts, elle est protégée par trois forts.

Nos voyageurs aperçurent tout d’abord le beffroi, orgueil des Berguenards, dont ils sont aussi fiers que des savantes fortifications de Vauban. C’est en effet un monument curieux et pittoresque du seizième siècle, ayant retenu quelque chose du style espagnol, soumis lui-même à l’influence de l’architecture des Maures, une haute tour carrée, chargée sur chacune de ses façades d’un double rang d’ogives aveugles superposées, flanquée dans sa partie supérieure de quatre tourelles polygonales, et terminée par un lanterne d’où s’échappe à toutes les heures le carillon cher aux villes flamandes.

Quentin et Martial conduisirent Jean à leur grand’tante ; puis après cette visite toute de politesse, comme ils avaient refusé par discrétion, vu l’âge avancé de leur parente, une invitation à dîner, ils allèrent prendre leur repas dans le meilleur restaurant de l’endroit. Pour faire la digestion d’un solide dîner flamand rien de mieux ne s’offrait comme de voir les curiosités de la ville.

Ils se mirent donc en mouvement pour visiter l’hôtel de ville et le musée, de construction nouvelle, édifiés exactement sur les plans d’un hôtel du seizième siècle, qui s’élevait au même endroit ; l’église Saint-Martin, fort belle, datant de 1500 environ ; son trésor, qui renferme la châsse de saint