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Page:Améro - Le Tour de France d’un petit Parisien.djvu/659

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LE TOUR DE FRANCE D’UN PETIT PARISIEN

mètres de hauteur des deux côtés d’un véritable escalier de roches. Elle entre en France par l’étroite gorge du Pont-du-Roi où son lit est très profondément encaissé. La Garonne descend alors vers Montrejeau, forcée de se replier vers l’est par le plateau de Lannemezan.

— Yes, fit l’Anglais, Lâneméchant !

Le gentilhomme campagnard haussa les épaules, et se tournant avec affectation du côté de Maurice et de Jean, il reprit :

— La Garonne décrit une grande courbe en longeant le faisceau de collines d’Armagnac ; elle passe près de Saint-Gaudens et arrive à Saint-Martory où elle prend la direction du nord-est. Au-dessous de cette ville, elle reçoit le Salat, qui doit son nom aux sources salées de ses bords et elle devient navigable ; puis elle entre dans une plaine d’alluvion où elle arrose Muret, reçoit l’Ariège, dont les premières eaux sourdent du milieu de pâturages appartenant à la république d’Andorre, et elle vient se heurter contre les dernières pentes des Cévennes, qui la rejettent alors vers le nord-ouest. En cet endroit elle a créé Toulouse, comme la Seine à créé Paris… Toulouse est en face du col de Naurousse, au débouché du canal du Midi dans la Garonne.

» Au delà de cette ville, la Garonne passe près de Castel-Sarrazin, et reçoit le Tarn. Elle coule alors à pleins bords ; elle arrose Agen, Marmande, la Réole, forme le port de Bordeaux, se grossissant sur son parcours du Lot et du Gers. À Bordeaux, la Garonne, large de six cents mètres est accessible aux grands navires ; la marée s’y fait sentir. À quelques lieues au-dessous de cette ville — au Bec d’Ambez — les eaux de la Dorgogne viennent se réunir à ses eaux, qui prennent alors le nom de Gironde. Ce n’est plus un fleuve, c’est un estuaire de onze à treize kilomètres de largeur qui débouche dans la mer entre la pointe de Grave et la pointe de la Coubre, au milieu de grands bancs de sable, en avant desquels s’élève sur un rocher le beau phare de Courdouan. »

Le gentilhomme campagnard eut pu ajouter que la Garonne fait quelquefois parler d’elle — en mal ; et que la plus grande de ses inondations durant les trois derniers siècles a été celle de 1875. « L’eau, s’éleva en certains endroits de plus de treize mètres au-dessus de l’étiage, dit M. Elisée Reclus dans sa belle Géographie ; un grand nombre de ponts furent emportés ; Toulouse, située au confluent de toutes les eaux pyrénéennes du bassin et à un endroit du fleuve beaucoup trop rétréci par les quais, se trouva partiellement inondée ; ses usines furent démolies ou dévastées, ses ponts s’écrou-