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Page:BLANQUI - Critique sociale, I.djvu/229

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le communisme, avenir de la société

délivrance n’est point le bras, mais le cerveau, et le cerveau ne vit que par l’instruction. L’attaque à cette mère nourrice de la pensée est un attentat contre l’être pensant lui-même, un crime social.

L’estomac ne peut supporter l’abstinence. Le cerveau s’y habitue aisément, au contraire. Plus il pâtit, moins il ressent le besoin. L’excès de privation ne lui donne pas l’avidité, mais le dégoût et la fatigue de la nourriture. Il ne sent pas son mal, il s’y complaît même, et s’abandonne volontiers aux langueurs de cette léthargie. Si le jeûne de l’estomac cause la mort physique, celui du cerveau amène la mort intellectuelle. Il ne reste que des brutes satisfaites de croupir dans une vie purement bestiale. C’est ainsi que, par une atrophie savante des facultés de l’âme, la tyrannie sait arriver à l’extinction morale d’un peuple, et le raie en quelque sorte de l’humanité. Une nation peut pardonner à ses oppresseurs la servitude, les prisons, les supplices, la misère, la faim, toutes les violences, toutes les calamités, toutes les douleurs, mais l’attentat sur son cerveau, mais l’étouffement de son intelligence, jamais, jamais, jamais ! Pour un tel forfait point de pardon possible !

Laissons donc là les billevesées, les programmes fantaisistes, les querelles de mots et de formes. Le salut du peuple est dans l’instruc-