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Page:BLANQUI - Critique sociale, I.djvu/50

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critique sociale

proie qu’il ne manque jamais. Une fois gavé, il songe à faire souche et à devenir quelqu’un. Gloire facile. Sa caisse lui sert de pavois. Il monte aux petits honneurs et, après lui, son héritier, né dans la soie, se trouve naturellement un grand personnage.

Crésus II ne tond plus sur un œuf. Il cesse de tout donner à l’épargne et fait la part de ses grandeurs. Commencement de décadence. Crésus III n’est déjà que demi-vautour. Il plume encore les pigeons, mais il est plumé par les tourterelles.

Gobseck. — Bigre !

Lazare. — Ah ! dame, on n’est pas marquis sans cela. De génération en génération, la métamorphose s’accélère. Les rapaces se changent en dissipateurs, et finalement, le dernier petit-fils d’Harpagon meurt sur la paille.

Gobseck. — Quel malheur !

Lazare. — Consolez-vous. La graine reste, Des bas-fonds de la misère surgissent incessamment des vampires nouveaux qui prennent la place des vampires disparus. Leur espèce ne s’éteint pas plus que celle des pigeons. La société y a la main. C’est sa garantie. Fondée sur le déplumage, elle entretient côte à côte les deux familles, l’une pour la pâture de l’autre. Mais elle aime et admire seulement le vautour ; quand il plane. Tant qu’il n’est pas monté, sitôt que