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Page:Braddon - La Femme du docteur, 1870, tome I.djvu/193

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LA FEMME DU DOCTEUR

vers un gentleman nonchalamment couché sur l’un des fauteuils placés dans une embrasure.

— Comment, Roland, je vous croyais à Corfou !

Le gentleman se leva avec une espèce d’effort et en esquissant un soupçon de bâillement, mais son visage s’éclaira néanmoins et il tendit la main à l’ex-maître d’Isabel.

— Mon cher Raymond, combien je suis heureux de vous voir ! Je me promettais de vous aller prendre au saut du lit, demain matin, et de vous accaparer toute une journée. Je ne suis revenu qu’hier au soir, pour complaire aux désirs de mon oncle et de ma cousine, qui m’ont rencontré à Bade et ont tenu à me ramener avec eux. Vous connaissez Gwendoline ?… Oui, c’est vrai, j’oubliais.

Une dame, les cheveux blonds et le nez aquilin, vêtue d’un chapeau qui était la simplicité même, et qui ne pouvait être que l’œuvre d’une modiste versée dans l’art suprême de cacher son talent, laissa tomber le lorgnon à l’aide duquel elle étudiait Jeanne de Naples, et tendit une main gantée d’une façon si exquise qu’on l’aurait crue sculptée dans du marbre gris.

— J’ai bien peur que M. Raymond ne m’ait oubliée, — dit-elle ; — il y a si longtemps que mon père et moi nous avons quitté le Midland.

— Aussi Lowlands commençait-il à prendre l’aspect d’une habitation abandonnée. Lorsque je passais devant vos portes, je pensais involontairement à la maison hantée de Hood. Mais, cette fois, vous êtes venue pour tout de bon ?… comme si vous pouviez venir pour autre chose, — s’interrompit galamment Raymond. — J’espère que vous êtes revenus avec l’intention de rester ?