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Page:Desforêts - Le p’tit gars du colon, 1934.djvu/42

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le p’tit gars du colon

vin gravi, tout est rayons, chansons, carillon. Le signal du clocher — l’entendez-vous ? glisse dans l’air sonore. Des grives chantent sur les branches élevées ; des flammes ardentes coulent du firmament splendide et boivent l’humidité de la nuit s’exhalant du sol en buée légère — Savanes reverdies, lac immense d’herbes frissonnantes, taillis d’aulnes et de trembles montrant leurs feuilles luisantes lavées par la pluie ; des ailes s’y pourchassent, des trilles s’en échappent. Les abeilles sauvages bourdonnent fébriles, par dessus la voiture, vers les floraisons vierges partout ressuscitées…

Oh ! les joies printanières !

Et dans les âmes, cette paix dominicale !

Soudain, soubresaut de la Grise. Sa vieille tête s’est dressée, et ses deux oreilles, toutes droites. Qu’est-ce donc ?

— Pour sûr, dit le père, elle a saisi l’odeur d’un ours.

— Allons-y, papa…

C’est François, figurez-vous, le petit homme de six ans, qui veut descendre de voiture et marcher sus à l’animal féroce. Irrésistible instinct du chasseur : l’enfant tient de race.

— Et que ferais-tu, petit François, questionna le père, amusé de l’envie du marmot… que ferais-tu si l’ours arrivait ?

— Le tuer, papa.