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Page:Desforêts - Le p’tit gars du colon, 1934.djvu/75

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la mort d’une mère

François le voit s’éloigner vers la lisière d’un morceau de forêt qu’on a gardé intact, un massif de gros arbres. Pourquoi va-t-il là-bas ? Il entre dans le bois sombre…

Mais il semble à François que sa mère s’est réveillée ; il se retourne ; il voit son regard fixé sur lui ; il en a presque peur… il se le reproche, et très vite le voici près du lit.

Il prend de ses deux petites mains tremblantes, la main posée sur le drap blanc, inerte… cette main d’une morte, comme son papa s’était imaginé ; s’il l’élevait dans la lumière de l’étroite fenêtre, cette main, jadis travaillante et ferme, paraîtrait misérablement diaphane.

— Maman chérie, pourquoi ne dors-tu pas ?

— Je vais dormir si longtemps, répond la voix redevenue faible.

L’enfant n’a pas compris ; les mots ? oui, car pour mieux entendre, il a mis son visage tout près de ses lèvres… et sa maman l’a baisé… et ses lèvres sont froides comme la main… les mots ? oui, mais le sens triste : dormir au cimetière… ce long sommeil que rien ne trouble… il n’a pas compris, non…

Un silence. Petit François caresse la main froide que ses mains, si chaudes, les siennes, ne peuvent ranimer. Sa maman dit quelque chose… Il écoute.