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Page:Fiel - Sur le sol d'Alsace, 1911.djvu/245

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SUR LE SOL D’ALSACE

Elle entrait, frissonnante, chez Mme Hürting qui laissait un moment son interminable tricot. Les deux femmes s’entretenaient de Fritz. Louise se demandait comment il allait revenir, et si la sévérité de son père aurait raison de ses dispositions.

Parfois leur tête-à-tête était troublé par la visite de quelque Alsacienne qui venait raconter à la doyenne de leur petite patrie, les innovations allemandes. Elle adoucissait les termes devant Louise qui eût voulu crier :

— Je suis des vôtres, parlez… mon cœur sait vos souffrances, car il les souffre !…

Souvent aussi, le père Frantz, un vieil Alsacien, entrait. Il confiait à Mme Hürting ses projets et racontait chaque fois la fuite de son petit-fils qui servait dans la légion étrangère. Il prononçait avec regret : légion étrangère… et disait : servir en France…

Il aurait voulu quelque régiment spécial, un régiment d’Alsaciens, des bataillons glorieux pour ceux qui bravaient tant de dangers et qu’on ne pouvait jamais aller voir… c’était trop loin… puis les nouvelles mettaient tant, et tant de