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de l’écriture sainte.

entre les mains de tout un grand peuple les actes qui les attestent rédigés par l’ordre des temps ? C’est ce que nous avons encore dans les livres de l’Ancien Testament, c’est-à-dire… dans les livres que le peuple juif a toujours si religieusement gardés[1]… Les Juifs ont été les seuls dont les convictions sacrées ont été d’autant plus en vénération qu’elles ont été plus connues. De tous les peuples anciens, ils sont le seul qui ait conservé les monuments primitifs de sa religion, quoiqu’ils fussent pleins de témoignages de leur infidélité et de celle de leurs ancêtres[2]. » Ces livres en effet ont été dès leur origine un monument, puisque dès leur origine ils ont été un livre public que tout le monde devait lire et méditer ; c’était le code authentique de la religion, de la jurisprudence, de la médecine et du gouvernement. Une tribu tout entière avait la charge de veiller à leur conservation : une suite non interrompue de prophètes avait l’œil à ce qu’on n’y fît aucune altération. Les Juifs schismatiques des dix tribus, et après eux les Samaritains, qui adoptèrent leur religion, avaient le Pentateuque entre leurs mains, et veillaient à leur tour à ce qu’on n’y fît aucun changement. Après la captivité, les Juifs hellénistes qui se servaient de la version des Septante, les Juifs schismatiques d’Héliopolis, les trois sectes qui se formèrent à Jérusalem, c’est-à-dire, les pharisiens, les sadducéens et les esséniens, n’auraient pu s’accorder ensemble pour y faire quelque interpolation, et n’auraient pas manqué de réclamer, si l’une d’entre elles avait osé changer les Ecritures dans quelque point essentiel. Enfin l’expérience a prouvé que ces livres ont été conservés sans altérations substantielles, puisque tous les manuscrits aussi bien que toutes les versions s’accordent parfaitement pour le fond, et que la plupart des fautes qui s’y sont glissées par accident peuvent se corriger par les règles d’une sage critique.

4. Ces livres renferment l’histoire la plus convenable à la nature des choses et aux monuments les plus certains. Le monde et l’homme lui-même n’étant pas éternels, ont dù être créés, et voilà ce que nous apprend Moïse dès la première page de la Genèse : toutes les nations en conséquence ont dû avoir une origine commune ; or, c’est encore ce que nous apprend Moïse dans le chapitre x de la Genèse, lequel, au jugement de Bochart, est une démonstration de la vérité de sa narration. Les traditions de tous les peuples, l’organisation du globe terrestre, la nouveauté de nos continents, supposent un grand cataclysme qui a noyé la terre ; et n’est-ce point ce déluge que Moïse nous a tracé dans les plus grands détails ? Enfin toutes les familles de la terre étant sorties d’une même souche, ont dû partir d’un point central. Or, a-t-on pu jusqu’ici

  1. Bossuet, Disc. sur l’hist. univ., seconde partie. Tom. XXXV, ch. XXVII, pag. 392-393
  2. Ibid. pag. 395.