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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/210

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LE CHIEN D’OR

— Oh ! c’est vous, bonne dame ! fit Caroline. Quel est donc ce silence inaccoutumé dans le château ?

— L’Intendant et ses hôtes sont partis pour la ville madame. Le gouverneur les a mandés. Un officier est venu exprès. Assurément, la plupart de ces messieurs n’étaient guère en état de se mettre en route, mais les bains, la toilette… Enfin ils sont partis. Quel bruit quand ils se sont élancés au galop ! Je n’ai jamais rien vu de pareil. Vous avez sans doute entendu, madame ?

— Oui, j’ai entendu. Et l’Intendant, est-il sorti en même temps ?…

— Oui, madame, le premier et le plus frais de tous. Les veilles et le vin ne lui font aucun mal. Puis il est si galant, si délicat avec les dames !

Caroline baissa la tête :

— Pourquoi dites-vous cela, dame Tremblay ? demanda-t-elle.

— Je vais vous l’apprendre tout de suite, madame. C’est parce qu’en sortant du château, il m’a appelée et m’a parlé comme ceci :

— Dame Tremblay !…

Il m’appelle toujours « dame Tremblay, » quand il est sérieux ; mais souvent, dans ses moments de bonne humeur, il m’appelle encore « charmante Joséphine, » comme aux temps de ma jeunesse… Ma jeunesse ! il en a entendu parler… et à mon avantage, j’oserai dire.

— Pour l’amour de Dieu ! dites-moi ce que vous a recommandé l’Intendant en laissant le château, fit Caroline impatientée.

Dans l’état de souffrance et d’affaissement où elle se trouvait, le bavardage de la vieille femme ne pouvait que lui déplaire.

— Oh ! il m’a parlé de vous avec attendrissement, m’a recommandé de vous donner les plus grands soins, d’obéir à toutes vos volontés, et de ne laisser entrer personne.

Caroline fut ravie de ces paroles. Son imagination ardente y trouvait des promesses de félicité.