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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/262

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LE CHIEN D’OR

tants de silence, l’on croyait entendre le murmure mystérieux du fleuve de vie qui s’échappait du trône de Dieu et de l’Agneau.

Les fidèles étaient plongés dans une méditation respectueuse. Cependant, quelques uns de ces indifférents qui semblent ne venir à l’église que pour voir et être vus, chuchotaient à l’oreille de leurs amis les rumeurs du jour. Le plaisir de se rencontrer valait bien à leurs yeux une petite prière !

Sur le perron se tenaient d’ordinaire, à l’heure des offices, quelques galants jeunes gens de la haute société. Ils présentaient l’eau bénite aux dames de leur connaissance. Cette piété mêlée d’un peu de galanterie n’est pas encore tout à fait disparue de notre temps, non plus que de ce lieu.

La porte de l’église était le lieu des assemblées, des rumeurs, des affaires, des rencontres, des annonces.

Là, les vieux amis s’arrêtaient pour se raconter les nouvelles, les marchands pour parler commerce. C’était la bourse et l’échange de Québec.

Là, le crieur public annonçait de sa voix d’airain, les proclamations royales du gouverneur, les édits de l’Intendant, les ordres de la Cour de justice, les ventes publiques et privées. Toute la vie de la cité semblait se concentrer là.

Quelques arbres majestueux, rejetons de la forêt primitive, ornaient la place du marché ; un mince filet d’eau l’arrosait en murmurant, et la croix du clocher y laissait chaque jour tomber son ombre comme une bénédiction.

III.

Deux jeunes gens fort bien mis, flânaient, cet après-midi-là, près de la porte du couvent, dans l’étroite rue qui aboutissait au marché.

Ils allaient et venaient sur un court espace, paraissaient impatients et regardaient souvent l’horloge du beffroi de la chapelle, à travers les ormes du jardin des Frères Récollets.

La porte du couvent s’ouvrit, et une demi-douzaine