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LE CHIEN D’OR

un plateau, je ferais mieux qu’Hérode, je tiendrais mes serments !

— Ô mon frère ! mon frère ! soupira la pauvre Amélie. Les De Repentigny n’aiment pas si follement que cela !… Non, jamais ! quel philtre empoisonné avez-vous donc bu pour vous éprendre ainsi d’une femme qui vous traite en esclave !… Non, Le Gardeur ! vous n’irez pas ! vous n’irez pas ! supplia-t-elle encore en se jetant à son cou. Ici, avec votre petite sœur, vous êtes en sûreté ! vous ne le serez plus si vous entrez dans cette maison des De Meloises !

— Je dois y aller, j’irai !… je le sais, j’ai bu un philtre enchanté, mais je ne veux point d’antidote ! Le monde ne saurait me guérir de mon amour pour Angélique ! Laisse-moi donc partir que j’aille recevoir d’elle mon châtiment pour être venu à Belmont et ma récompense pour avoir obéi à ses ordres !

— Pauvre frère ! pensez-vous qu’Angélique réponde à votre amour ? Elle est, comme nous toutes, faible et inconstante ! Elle n’est pas, cette Angélique, l’idéal que l’homme cherche dans la femme qu’il aime !…

— Pourvu qu’elle me soit fidèle à moi !… Mais elle va me trouver faible et inconstant, moi, si je tarde encore à l’aller rejoindre… Adieu ! petite sœur !

XIX.

Il se leva. Amélie pleurait. Elle ne voulait pas jeter le désespoir dans son âme… Et pourtant ! elle se rappelait avec amertume et indignation les propos d’Angélique, et ses intentions au sujet de l’Intendant. Voulait-elle donc, la perverse ! se servir de son frère comme d’une ombre qui ferait mieux ressortir ses charmes aux yeux de Bigot !

— Mon bon frère, reprit Amélie, je suis femme et je comprends les femmes mieux que vous ne pouvez le faire. Je connais Angélique et son incroyable ambition… Elle ne reculera devant aucun moyen. Êtes-vous convaincu, intimement convaincu, de la sincérité de son amour ? Croyez-vous qu’elle vous