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Page:Kirby - Le chien d'or, tome I, trad LeMay, 1884.djvu/442

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LE CHIEN D’OR

et elles dirent que Le Gardeur ferait bien de ne pas l’épouser pour la punir de sa coquetterie, et montrer aux gens comme il se souciait peu d’elle.

— Or comme il s’en soucie fort, observa madame Latouche, une veuve qui ne manquait ni d’expérience, ni de gaieté, je pense, continua-t-elle, que s’il se marie avec Héloïse de Lotbinière, on dira que c’est par désespoir, par dépit et non par amour. Cela s’est vu déjà, se marier par dépit.

Les jeunes filles chuchotèrent entre elles que cela lui était arrivé. Elle s’était mariée avec le sieur Latouche par malice, parce qu’elle n’avait pas pu avoir le sieur de Marne qui lui préféra une femme riche et lui permit à elle, la pauvre délaissée, d’aller mettre le feu à d’autres cœurs.

II.

L’Intendant se félicitait d’avoir lancé cette nouvelle. Elle allait faire son chemin.

Déjà une couple des plus intimes amies d’Angélique étaient rendues près de la fontaine, et assises de chaque côté de la grande coquette qu’il fallait punir, les mains sur son épaule, elles lui racontaient à l’oreille, l’histoire joliment allongée déjà, du mariage de Le Gardeur avec Héloïse de Lotbinière.

Angélique n’eut pas de peine à les croire ; c’était la suite toute naturelle de son infidélité. Pouvait-elle espérer qu’il lui resterait dévoué, cet homme qu’elle avait trahi ? Elle l’aimait toujours cependant, et sa jalousie se réveilla soudain à la pensée qu’une autre allait être aimée de lui.

Ses deux amies étudiaient avec curiosité les impressions qu’elle ressentait : elles étaient ravies de voir comme cette nouvelle la piquait au vif ; mais le malin plaisir se déguisait parfaitement sous la sympathie. Elles ne se laissèrent pas tromper par l’apparente indifférence et le rire forcé de leur jalouse compagne, et elles entendirent l’orage qui grondait dans son sein.

Elles revinrent toutes deux retrouver leurs com-