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le chien d’or

Fanchon, n’est pas une fille de confiance ; mais je n’ai pas autre chose à faire dire à sa tante. Il faut que je sois prudente avec la Corriveau, aussi, et que je l’amène à me suggérer ce que je veux faire… Madame de Beaumanoir, votre destinée n’est pas, comme vous le croyez, entre les mains de l’Intendant ! Il eut mieux valu, pour vous, obéir à des lettres de cachet que tomber entre les mains de la Corriveau !…

Le soleil parut. Il inonda de ses douces clartés la fenêtre près de laquelle Angélique venait de s’approcher. Angélique se retourna, comme pour ne pas voir la lumière du ciel. Elle aperçut son image qui se dessinait vive et nette dans la grande glace Vénitienne. Elle se trouva pâle, l’air dur, l’œil plein d’un feu sombre. Elle se prit à trembler, se détourna encore, pour ne plus se voir, et s’avança lentement, péniblement vers son lit. Il lui semblait qu’elle avait vieilli, que la rage grondait dans son âme, et qu’elle s’était déshonorée pour l’amour de cet Intendant infidèle, qui l’oubliait, et lui reprochait maintenant de s’être avilie comme nulle femme au monde.

— C’est sa faute ! c’est sa faute ! s’écria-t-elle en se tordant les mains… Si elle meurt, c’est sa faute à lui et non la mienne ! Je l’ai supplié de l’éloigner, et il n’a pas voulu ! C’est sa faute ! C’est sa faute !

Elle tomba dans un sommeil fiévreux, pénible, fatigant, plein de songes affreux, qui dura jusqu’au milieu du jour.