Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/209

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

174
souvenirs

nom était très-honorable, puisque, au treizième siècle, on s’en servait encore pour désigner les chevaliers les plus recommandables, et que Philippe Auguste en avait fait une sorte de titre d’honneur par lequel il distinguait les plus braves de ses barons[1].

La ville de Lyon avait, au moyen âge, sa Chasse à Ribauds ; mais cette chasse n’avait aucun rapport avec la nôtre ; et ce que nous allons en dire n’est que pour faire connaître les principales acceptions du mot ribaud. — On donnait, à Lyon, le nom de Chasse-ribauds, à une espèce de couvre-feu ou de retraite que la trompette sonnait, tous les soirs, du haut des tours de Notre-Dame de Fourvière. Aussitôt que ce signal avait retenti, les ribauds et malandrins de toute espèce devaient vider les brelans et autres maisons mal famées, sinon le roi des ribauds les faisait saisir par ses estafiers et conduire en lieu sûr. Ce même roi des ribauds avait une manière fort originale de procéder à l’arrestation des filles de joie qui s’éloignaient du quartier qu’il leur avait assigné : il lançait sur les délinquantes un immense épervier et les remorquait, enveloppées du filet, jusqu’au cloître Saint-Jean[2].

On remarque à Issoudun, dans la rue de Home, une très-vieille enseigne sculptée sur pierre, qui représente le Roi des Ribauds. Ce ribaud-là n’était ni un vaurien, ni un officier de police ; c’était tout simplement le roi des buveurs de son temps, une manière de président de quelque ancien Caveau. Il est impossible de s’y méprendre, car tandis que d’une main il tient un rouge-bord, de l’autre il soulève son chaperon et salue gaiement les allants et les venants en jetant à chacun d’eux ces paroles pleines de bénévolence : À la santé ! — Ces trois mots sont gravés au bas de l’image, et

  1. Pasquier, Recherches sur la France, liv. VIII, ch. iv ; — Houard, Lois anglo-normandes, t. I, p. 222.
  2. Paradin, Histoire de Lyon ; — Aimé Guillon, Lyon tel qu’il était et tel qu’il est, p. 125 et 126.