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Page:Laisnel de La Salle - Croyances et légendes du centre de la France, Tome 1.djvu/37

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souvenirs

Dans nos domaines, la force réunie de plusieurs hommes est nécessaire pour apporter et mettre en place la cosse de Nau, car c’est ordinairement un énorme tronc d’arbre destiné à alimenter la cheminée pendant les trois jours que dure la fête de Noël.

À l’époque de la féodalité, plus d’un fief a été donné, à la charge, par l’investi, de porter, tous les ans, en personne, la cosse de Nau au foyer de son suzerain. Un devoir seigneurial absolument semblable était, dit-on, attaché à certain fief servant qui relevait du château de Saint-Chartier (Indre). — « Il ne serait pas facile, dit, à propos de cette coutume, Boutarie[1], de trouver aujourd’hui des seigneurs qui voulussent donner d’amples possessions à aussi bon marché. » — Cet usage nous rappelle qu’il existait au château de Fontenay, près de Nérondes (Cher), une obligation de même nature, mais beaucoup plus assujettissante : « Tous les hommes de la seigneurie étaient tenus, chaque fois qu’ils montaient à ce château, situé sur une butte élevée, d’y porter sur leurs épaules une bûche pour le foyer du châtelain[2]. »

La cosse de Nau doit, autant que possible, provenir d’un chêne vierge de tout élagage, et qui aura été abattu à minuit. On la dépose dans l’âtre au moment où sonne l’élévation de la messe nocturne, et le chef de la famille, après l’avoir aspergée d’eau bénite, y met le feu.

C’est sur les deux extrémités de la bûche ainsi consacrée que les mères et surtout les aïeules se plaisent à disposer les fruits, les gâteaux et les jouets de toute espèce auxquels les enfants feront, à leur réveil, un si joyeux accueil. — Comme on a fait croire à ceux qui pleuraient pour aller à la messe de minuit, qu’on les mènerait à la messe du coussin blanc, — c’est-à-dire qu’on les mettrait au lit, — on ne manque jamais, le lendemain matin, de leur dire que, tandis qu’ils

  1. Traité des droits seigneuriaux, p. 645 de l’édition de 1775.
  2. M. Raynal, Histoire du Berry, t. II, page 209.