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par les normands vers l’an mille

perche. Alors Karlsefni et les siens montrèrent leurs boucliers et quand ils se furent rapprochés, ils commencèrent à faire des échanges. Les étrangers désiraient surtout acheter de l’étoffe rouge, en échange de quoi, ils offraient des pelleteries et des peaux toutes grises. Ils désiraient aussi acheter des épées et des lances, Karlsefni et Snorri s’y opposèrent. En échange des peaux en très bon état, les Skroelings prenaient des morceaux d’étoffe rouge d’une main de large, qu’ils nouaient autour de leurs têtes. Le marché continua ainsi pendant quelque temps jusqu’au moment où Karlsefni et les siens commencèrent à être à court d’étoffe. Ils la coupèrent alors en morceaux qui n’avaient guère plus qu’un doigt de largeur. Les Skroelings continuèrent à donner juste autant qu’avant ou même plus.

Il arriva alors qu’un taureau qui appartenait à Karlsefni sortit du bois et beugla très fort. Ceci terrifia tellement les Skroelings qu’ils coururent à leurs canots et firent force rame le long de la côte vers le Sud. On ne vit plus rien d’eux pendant trois semaines entières. Puis, une grande quantité de bateaux de Skroelings furent aperçus venant du Sud, comme le courant d’un fleuve, et ils agitaient tous leurs bâtons dans le sens inverse de la course du soleil en poussant des cris. Alors Karlsefni et ses hommes prirent leurs boucliers rouges et les montrèrent. Les Skroelings sautèrent de leurs canots, les abordèrent et combattirent. Ce fut une pluie serrée de projectiles, car les Skroelings avaient des frondes. Les compagnons de Karlsefni observèrent que les Skroelings élevaient une perche avec une chose de la forme d’une grosse boule, presque de la taille d’un ventre de mouton et presque noire de couleur et ils lancèrent cette chose avec la perche par dessus les hommes de Karlsefni, Cela fit un bruit effrayant en tombant. Alors, une grande panique s’empara de Karlsefni et de tout son monde. Chacun ne pensa qu’à fuir le long de la berge de la rivière, car il semblait que la troupe des Skroelings attaquait de tous côtés. Les fuyards ne s’arrêtèrent qu’à un rocher saillant où ils offrirent une grande résistance. Freydis[1] sortit et voyant que Karlsefni et ses hommes

  1. Fille d’Eirik, femme de Thorvald ?