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quent d’ailleurs bien à la région : on peut y trouver des fruits sauvages qui peuvent rappeler le raisin, peut-être même du raisin, de la rosée, une sorte de graminée ressemblant à du froment, le bétail peut en général y paître en hiver au plein air. On y trouve des arbres de taille suffisante pour faire du bois de construction[1]. Enfin, les jours y sont plus longs qu’au Groenland, donc plus égaux aux nuits.

Il n’y a là qu’une hypothèse qui présente des côtés discutables. Les Normands, s’ils étaient entrés dans le Saint-Laurent, auraient pu être tentés, comme les navigateurs français, plus tard, de s’établir sur la rive nord qu’ils avaient longée auparavant, de préférence à la rive sud que rien ne leur indiquait spécialement.

Ils auraient pu reconnaître, comme nous l’avons signalé plus haut, qu’ils étaient, non sur la mer, mais sur un fleuve, immense à vrai dire, et tenter de le remonter, comme plus tard le fit Cartier, comme Eirik le Rouge l’avait fait pour les fjords du Groenland. On ne trouve aucune allusion à tout ceci dans le texte, non plus qu’à la grande île de Terre-Neuve et au détroit de Belle-Isle.

Toutefois, aucune de ces objections ne vient absolument à l’encontre de l’hypothèse qui présente par ailleurs des côtés tentants et qui, selon l’opinion de M. Fossum, remplit le maximum de concordance des textes.

Si nous passons à l’étude du voyage de Thorvald, nous retrouverons un appui à cette hypothèse. Thorvald est le frère de Leif. Il reçoit de lui tous les renseignements utiles et retrouve sans difficulté son campement au Vinland, c’est-à-dire, suivant ce qui précède, la rive sud du Saint-Laurent.

Il entreprend une exploration méthodique de la région. Dans ce but, il envoie un canot vers l’Ouest. Les marins de ce canot y trouvent une contrée agréable, boisée, avec des plages, de nombreuses îles et des hauts fonds. Tout ceci s’applique fort bien à la rive sud du grand fleuve, du côté de la Gaspésie. On peut même

  1. Cartier en a trouvé aussi le long du Saguenay : « de sorte que y avons veu arbre suffisant à master navire de trente tonneauls ».