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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/104

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LA PLUS BELLE CHOSE DU MONDE

mains jointes sur le crucifix : toucher aux morts chasse la crainte que l’on peut avoir de leurs fantômes. Elle savait cela, mais elle touchait les doigts de cire par tendresse. En les caressant, elle remarquait à quel point ils avaient la forme des siens. Les jours suivants, à table, Monique constatait qu’elle allongeait la main sur la nappe comme elle l’avait vu faire à son père. Elle s’était toujours assise près de lui. Quand il étendait ainsi le bras, son repas fini, il frôlait l’assiette de Monique et la gênait un peu. Sans s’en être jamais aperçue, elle répétait le même geste. Gênerait-elle aussi ses enfants, plus tard ?


Tout de suite le soir, Nicole était venue. Lucette écrivit de Percé une grande lettre tendre, et Claire, de Saint-Jérôme. Toutes les deux participaient à l’épreuve de Monique ; elles préféraient peut-être exprimer leur peine par écrit. Il est si difficile de dire de vive voix la sympathie que l’on ressent.

Nicole négligeait Alain pour être auprès de Monique. Elle l’accompagna dans les pénibles courses qu’entraîne un deuil, la réconforta surtout de sa présence, de sa chaude amitié.

Longtemps ensuite, le soir ramena le souvenir vif des jours où son père reposait dans son cercueil. Le salon avait repris son aspect de tous les