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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/135

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XIII


Le 11 novembre 1918, Monique, Nicole et Lucette passaient la soirée chez Claire.

À Montréal, peu de jours auparavant, la nouvelle de l’Armistice avait été semée sur la ville par un tintamarre subit. Toutes les cloches d’églises, de couvents, avaient sonné soudain, et en même temps s’élevait et se multipliait graduellement le cri des sirènes d’usines, des sifflets de bateaux et de locomotives.

Étonnés, inquiets, les gens s’étaient penchés à leurs fenêtres. Dans la rue, quelqu’un lança « Vivent les alliés ». L’acclamation s’était répétée de bouche en bouche. Des yeux s’étaient embrumés de larmes. Bientôt, pendant que se déchaînait l’ouragan des bruits, et que la foule s’amassait, une à une, les maisons s’étaient pavoisées.

Comment croire cependant à la réalité de cette heure ? Que la paix fût signée, que l’on pût enfin s’amuser, être heureux, sans songer aux blessés, aux morts, à l’angoisse des mères, des sœurs, des épouses, à ce cauchemar de sang ? Cela semblait inconcevable.

Le jour pesait, pluvieux sur l’asphalte noire. Les arbres dénudés tendaient vers le ciel leurs