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à mesurer sur sa montre le temps que durerait la patience de son amie. À cette idée elle se révoltait, murmurait :

— Non, elle dépasse les bornes, je m’en vais…

Mais justement, Nicole sortait par la petite porte du couvent, et tout de suite, montrait patte de velours, se moquait tendrement et grâce au sortilège de sa nature attachante, redonnait à Lucette sa bonne humeur, à Lucette qui, une fois de plus, se promettait bien d’être silencieuse, détestable, et qui recommençait tout simplement à jouer son rôle de bon petit peloton de fil que Nicole roulait et déroulait à son gré…


Un peu avant dix heures, Monique quitta ses amies qui discutaient avec feu sur le nationalisme, et revint poussant la wagonnette à thé bien chargée :

— Voilà pour vous remettre d’accord…

Elles laissèrent tomber la politique et se jetèrent sur les sandwiches. Elles étaient, prises isolément, polies et bien élevées, mais entre elles, donnaient libre cours à leur voracité d’adolescentes, toutes, sauf Claire qui disait :

— Dieu, que cela semble bon, à vous voir dévorer…

Mais elle n’avait jamais faim.

— Elle pense trop, assurait Monique.