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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/249

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CHOSE DU MOKDE

24771 I

venirs se composaient pour ainsi dire d’une matière plus précieuse, comme des vases pétris d’un kaolin plus fin, plus immatériel.

— Comment, avait demandé Lucette, cette réponse ne nous est-elle pas venue autrefois ? Nous aimions déjà beaucoup les livres pourtant.

— Oui, avait tout de suite répondu Monique, mais nous n’étions que de petites bécasses, uniquement occupées de notre cœur et de notre avenir. Aujourd’hui, nous possédons toujours notre même cœur et ses tourments ; mais Page nous a instruites. Nous avons ce don nouveau de jouir enfin du présent, de chercher le bonheur dans le présent, d’être guéries d’attendre pour demain une félicité impossible. Est-il chose plus agréable que de détenir l’experience ! de n’être plus une jeune fille agaçante les yeux toujours avidement tournés vers d’illusoires délices futures ? Quel repos comparable à celui de n’être plus dupes des mirages, de ne plus attendre, de ne plus jamais souhaiter qu’une heure passe vite ; jeunes, nous ne savions pas lire tranquilles.

tandis qu’aujourd’hui, lire devient une béatitude, un délice en soi, la consolation, enfin, mes amies, la plus belle chose du monde.

Lucette aurait voulu tout noter. Monique, originale, amusante, pleine de feu, parlait sans trêve. C’était un plaisir toujours nouveau de la