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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/31

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CHOSE DU MONDE
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sortes. Elles appartenaient pourtant à des milieux paisibles ; ailleurs, que serait pour elles le frottement avec les réalités plus cruelles ?

Lucette, qui se sentait isolée dans sa famille, où personne n’aimait ni la littérature, ni Poupon Rose, se réfugiait le dimanche avec livre, plume, cahier, au fond de la maison, dans une chambre où régnait le silence ; et elle écrivait tout l’après-midi des phrases mélancoliques. Poupon Rose ne lui suffisait plus pour la consoler dans la vie. Elle essayait bien d’imaginer une bonne fortune providentielle rapprochant de la sienne l’existence de son héros ; peur-être s’appuierait-elle à son bras pour l’avenir tout entier ? Mais non. Son bon sens aussitôt réprouvait cette possibilité. Ils n’étaient pas nés du même côté de l’océan ; elle ne se représentait pas Poupon Rose au sein de sa famille. Mieux valait l’abandonner au vague des rêveries, que de le tirer dans le milieu précis où elle vivait. Il n’apporterait pas le bonheur.

L’austère Nicole évitait mieux les vaines tristesses. Elle sortait toute la journée, accomplissant beaucoup d’actes de dévotion, assistant à la grand’messe, à vêpres.

Monique ennuyait ses sœurs aînées en les chaperonnant avec trop de zèle, en tentant de se rendre intéressante auprès de leurs prétendants.