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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/39

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CHOSE DU MONDE
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arbres. Leurs raquettes se détachaient, elles enfonçaient jusqu’à mi-jambes, se retenaient à des arbustes trop graciles, tombaient pour remonter avec un nouvel entrain. Et elles retrouvaient alors dans l’odeur fraîche de la neige le souvenir des jeux de leur enfance.

Mais le soleil d’hiver sombrait tôt derrière la montagne. Les ombres bleues s’allongeaient saisissantes.

Elles descendaient vers l’avenue des Pins, par laquelle elles reviendraient. Passant devant le chateau de Ravenscrag, elles jetaient de nouveaux regards d’envie. Ah ! habiter une demeure aussi splendide au pied d’un mont, être séparé du monde par un beau parc et des pins bruissants, quel rêve ! Il semblait à Claire et à Monique qu’à une hauteur pareille elles seraient parfaitement heureuses, parfaitement belles, et extraordinairement intelligentes ; petites millionnaires penchées aux fenêtres d’une tourelle…

— Si vous aviez été ces petites millionnaires, mes chéries, vous ne seriez plus de ce monde, puisque sur les trois enfants à Ravenscrag, deux ont péri dans le naufrage du Titanic…

Elles n’y pensaient déjà plus. Pourtant, quand ces petites filles étaient mortes, leur portrait publié dans les journaux les avait singulièrement