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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/41

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CHOSE DU MONDE
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seyant, des gants de peau qui moulaient parfaitement ses jolies mains. Ses mains, elle les découvrait parce qu’elle avait dix-huit ans ! Elle se mit à les soigner, à polir ses ongles et à les admirer quand elle n’avait rien à faire.

Et son tailleur marine se transformait en costume de contes de fées. Quand elle l’endossait, elle savourait son âge tout neuf, l’étape qui commençait ; elle se sentait inondée de doux et vagues espoirs. Dans la glace, elle avait également redécouvert ses traits. Autrefois, elle les avait examinés d’un œil mécontent, critique ; mais à présent, sans que sa figure eût changé, elle leur découvrait une expression touchante, qui la retenait. Elle passait son index poli le long de son nez droit. Elle lissait ses fins sourcils, appréciait la couleur claire de ses yeux et, quand elle souriait, elle prenait plaisir à compter ses dents régulières, blanches. En se coiffant le soir pour la nuit, ses tresses lourdes tombaient sur ses épaules. Elle les défaisait, jouait rêveusement avec la soie de ses cheveux, caressait machinalement ses bras blancs, les trouvait doux, n’analysait pas son sentiment, rougissait un peu de se voir devenir femme et en même temps éprouvait un tel contentement. Des choses prodigieuses surviendraient, qu’elle attendait sans impatience maintenant, confiante et l’âme enchantée.