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Page:LeNormand - La plus belle chose du monde, 1937.djvu/57

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Enfants et égoïstes, et il fallait leur pardonner. Lucette avait de quoi méditer.


Des voyageurs montaient sans cesse. Le moment du départ approchait. L’impatience de Lucette croissait. Elle ne vivait plus. Nerveuse, elle désirait prendre le train tout de suite. Sa montre ne marquait pas encore l’heure, mais elle redoutait de rester sur le quai. À bord, elle se sentirait sûre du voyage. Jusque-là il pouvait toujours survenir quelque chose.

Enfin, du balcon à l’arrière du wagon, elle se pencha vers ses amies. Une vague de bonheur la soulevait.

— D’ici, je vais me voir partir.

— Et nous abandonner, égoïste !


Elle les vit agiter leurs mouchoirs, puis la voie tourna et elle ne les vit plus. Le train commença son roulis sonore et régulier. Lucette poussa un soupir profond. Elle partait ! elle était partie !

Ce n’était plus un rêve, un simple projet. Le rail s’allongeait, brillant d’un éclat qu’elle trouvait magique. Le soleil se couchait. Sous le ciel coloré, le train traversait un quartier sordide. Des maisons aux briques enfumées la regardaient, lui semblait-il, avec envie. Juchés sur les palissades, des enfants de la main lui faisaient signe ; elle leur