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Page:Maupassant - Fort comme la mort, Ollendorff, 1903.djvu/249

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V

Les idées fixes ont la ténacité rongeuse des maladies incurables. Une fois entrées en une âme, elles la dévorent, ne lui laissent plus la liberté de songer à rien, de prendre goût à la moindre chose. La comtesse quoi qu’elle fît, chez elle ou ailleurs, seule ou entourée de monde, ne pouvait plus rejeter d’elle cette réflexion qui l’avait saisie en revenant côte à côte avec sa fille : « Est-il possible qu’Olivier, en les revoyant presque chaque jour, n’eût pas sans cesse à l’esprit l’obsession de les comparer ? »

Certes il devait le faire malgré lui, sans cesse, hanté lui-même par cette ressemblance inoubliable un seul instant, qu’accentuait encore l’imitation naguère cherchée des gestes et de la parole. Chaque fois qu’il entrait, elle songeait aussitôt à ce rapprochement, elle le lisait dans son regard, le devinait et le commentait dans son cœur et dans sa tête. Alors elle était torturée par le besoin de se cacher, de disparaître, de ne plus se montrer à lui près de sa fille.

Elle souffrait d’ailleurs de toutes les façons, ne se sentant plus chez elle dans sa maison. Ce froissement de dépossession qu’elle avait eu, un soir, quand tous les yeux regardaient Annette sous son portrait, conti-