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Page:Maupassant - Fort comme la mort, Ollendorff, 1903.djvu/315

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fort comme la mort

une goutte de sang sous la peau. Ses joues caves paraissaient aspirées à l’intérieur du visage, et ses yeux aussi étaient rentrés comme si quelque fil les tirait en dedans.

Il vit bien la terreur de son amie et soupira :

— Me voici dans un bel état.

Elle dit, en le regardant toujours fixement :

— Comment cela est-il arrivé ?

Il faisait, pour parler, de grands efforts, et toute sa figure, par moments, tressaillait de secousses nerveuses.

— Je n’ai pas regardé autour de moi… je pensais à autre chose… à tout autre chose… oh ! oui… et un omnibus m’a renversé et passé sur le ventre…

En l’écoutant, elle voyait l’accident, et elle dit soulevée d’épouvante :

— Est-ce que vous avez saigné ?

— Non. Je suis seulement un peu meurtri… un peu écrasé.

Elle demanda :

— Où cela a-t-il eu lieu ?

Il répondit tout bas :

— Je ne sais pas trop. C’était fort loin.

Le médecin roulait un fauteuil où la comtesse s’affaissa. Le comte restait debout au pied du lit, répétant entre ses dents :

― Oh ! mon pauvre ami… mon pauvre ami… quel affreux malheur !

Et il éprouvait vraiment un grand chagrin, car il aimait beaucoup Olivier.

La comtesse reprit :

— Mais où cela est-il arrivé ?

Le médecin répondit :

— Je n’en sais trop rien moi-même, ou plutôt je