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Page:Nerval - Élégies nationales et Satires politiques, 1827.djvu/46

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V.

Le héros va partir ; mais il cherche des yeux
Quels seront les objets de ses derniers adieux :
Exilé loin d’un fils, d’une épouse qu’il aime,
Serait-il sans parens, comme sans diadème ?
Non ! près de lui restés, quelques braves soldats,
Pour la dernière fois se pressent sur ses pas.
Ces preux, feuillets vivans d’une héroïque histoire,
Semblent représenter tout un siècle de gloire ;
Et, de mille combats magnanimes débris,
Sur leurs corps mutilés les porter tous écrits :
Les voilà ses parens ! La voilà sa famille !
Une larme muette en leurs yeux roule et brille,
Tous leurs fronts sont levés, tous leurs bras étendus
Vers celui que sans doute ils ne reverront plus….
Touché de leur douleur, que lui-même il partage,
Napoléon s’arrête, et leur tient ce langage :

« Soldats, cédant aux coups du sort victorieux,
J’abandonne l’empire, et vous fais mes adieux ;
J’ai guidé vos drapeaux aux champs de la victoire….