Aller au contenu

Page:Neulliès - Tante Gertrude, 1919.djvu/88

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
86
TANTE GERTRUDE

La jeune demoiselle de compagnie ne put s’empêcher de sourire. Vraiment l’ouvrage était bien fait ! La servante ne volait pas ses gages.

Paulette, qui surprit son sourire, essaya avec sa bonté naturelle d’excuser la négligence de Charlotte.

— Elle pourrait être plus soigneuse, n’est-ce pas ? dit-elle à son amie. Mais je la dérange toujours pour m’aider à ma toilette. Et puis, j’ai le talent de mettre le désordre partout où je passe, de sorte que cette pauvre fille n’a jamais fini.

Peu à peu, Thérèse parvint à se rendre compte de la situation. Après avoir vérifié toutes les notes, elle arriva au total de cinq mille francs dus par Mme Wanel.

— Comment payer tout cela ?

Et Paulette, en faisant cette question, attachait sur son amie ses grands yeux éplorés, tout en joignant les mains dans un geste de désespoir.

Thérèse, énergique comme elle l’était, eut bientôt pris une résolution.

— Ayez confiance en moi, chérie, dit-elle à la jeune femme, en l’embrassant. Je vais réfléchir à ce qui peut être tenté. Ne vous découragez pas ; je reviendrai ce soir vous dire si j’ai réussi. Au revoir.

— Que vous êtes bonne ! s’écria Paulette ravie et déjà toute consolée. Mais comment ferez-vous ?

— Ayez confiance… Je vous aiderai… À tout à l’heure.

Thérèse eut bientôt franchi de son pas alerte la distance, assez longue pourtant, qui séparait Ailly de Neufmoulins. Mais ce ne fut pas vers le château qu’elle se dirigea. Sans une hésitation elle prit à droite la grande avenue qui conduisait à l’Abbaye. Jean Bernard eut un étonnement en voyant entrer la jeune fille, rougissante et émue malgré elle. C’était la première fois qu’elle franchissait le seuil du logis du régisseur, et, pour venir ainsi seule, il lui fallait assurément une raison bien grave.

Le jeune homme le comprit, et lui ayant avancé le fauteuil qu’il occupait à son arrivée, il attendit, debout contre la cheminée, dans une attitude pleine de respect, que Thérèse parlât.