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Page:Picard - Sabbat, 1923.djvu/124

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SABBAT

une si étonnante candeur ! Comme tu as cru dire des abominations !

— Oui.

— Ah ! Ah ! Tu n’ignores, pourtant, pas que la damnation est ailleurs, et que sentir une rose est le grand tourment pour le poète, donc le grand péché. Mes mille tentations dévorantes n’entourent que celui qui rêve, les bras croisés, sur son vêtement de lin, et l’enfer — par ma foi ! — l’enfer, on le visite en robe de Béatrix et en couronne de laurier.

Quant à ce chapitre que tu me consacres, où en est-il ?

— Ô mon Archange rayonnant ! Tu as bien vu que je comptais, pour le nourrir, sur la sale magie, la sombre cabale, les horribles messes à rebours, les immondes sorcières qui vont s’accroupir autour de la lune tandis que Belzébuth, chien des ténèbres, hurle dans le silence des morts…

— Folle !

— Pourquoi ?

— Sacrée engeance des poètes ! Ils ne doutent de rien, et comme ils ont raison ! « Et votre livre ? Quand nous le donnez-vous ? » leur demande-t-on… « Mon livre ? Je l’ai quasiment fini… — Hum ! — Oui, fini… » Ils n’en ont que le titre. Mais quels génies ne voltigent pas autour du titre d’un livre de poète, surtout quand il est à faire ? D’eux-mêmes, les génies en forment les pages, et puisque tu as bien voulu nommer : Satan la deuxième