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Page:Sand - Confession d une jeune fille - vol 1.djvu/297

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et voyait encore, car elle me regarda comme pour se demander si j’étais un rêve. Elle fit un grand effort pour parler, et réussit à dire : Barthez !… c’est ma fille, vous savez !… Sa tête se pencha en arrière et sa figure exprima un calme divin. Je la crus morte, j’étouffai un cri. Jennie me contint d’un regard dont l’autorité eût plié le monde. Dans ce moment où l’éternité s’ouvrait devant elle, notre bien-aimée ne devait pas entendre les sanglots de l’adieu terrestre. M. Barthez voulut m’emmener, mais aucune force humaine ne m’eût détachée de ce fauteuil que j’étreignais en silence. Quelques minutes s’écoulèrent ainsi, et il me fut impossible de saisir le passage de la vie à la mort sur cette figure paisible qui me regardait toujours. M. Reppe, qui était en tournée, entra, vit, ne dit mot, toucha et écouta.

— Eh bien, c’est fini ! dit-il, voilà tout.

C’était comme s’il eût dit : « Vous voyez qu’il n’est pas difficile de mourir. »

Je n’y comprenais rien, je n’y croyais pas. Ma grand’mère était là, sous mes yeux, dans la même attitude et avec la même figure que j’avais étudiées cent fois durant ses heures de lassitude ou d’assoupissement.

— Allons, allons ! dit le docteur en me secouant. Vous n’aviez pas besoin de le savoir, mais il y a