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Page:Sand - La Filleule.djvu/108

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mes de ma modique pension, deux petites sommes au payement des dettes d’un ami encore plus gêné que moi. J’étais donc forcé de lui manquer de parole à mon tour, et on a si mauvaise grâce à accuser ses parents, que si je n’eusse été hors d’état de me mouvoir, j’aurais pris des crochets ou un fiacre à conduire, plutôt que d’en venir à cette honteuse excuse.




XI


Je quittai mon lit pour me mettre en quête d’un emploi ; mais il me fallait, pour entrer dans une industrie quelconque, un répondant connu des industriels, et je n’en connaissais aucun, ne voulant pas invoquer l’appui de Clet et de sa famille.

Pour occuper une fonction dans le gouvernement, si obscure qu’elle fût, il me fallait des titres ou un surnumérariat. J’aurais pu donner des leçons, être répétiteur dans un collége, ou seulement maître d’études. Pour tout cela, il me fallait des protecteurs, des connaissances. J’avais vécu trop seul, et pour rien au monde je n’aurais voulu m’adresser à madame Marange ou à sa fille, par conséquent, à aucune personne de leur entourage.

Je vis quel affreux métier est celui de solliciteur. Je le fis avec courage et sans vouloir me sentir atteint d’une humiliation, ni blessé d’aucune méfiance. Si on était peu accessible pour le malheur, c’était la faute du genre humain, qui apparemment pullule de malheureux lâches et fourbes.

Cependant la détresse arrivait avec une effrayante rapidité.