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28 septembre

Il m’a fait beaucoup de peine aujourd’hui. Il est venu à quatre heures, comme tous les jours, et je me suis trouvée seule au salon lorsqu’il est entré. J’étudiais mon piano, je me suis levée bien vite pour ne pas l’ennuyer. Il m’a dit de continuer et a pris le journal. Je l’ai supplié de ne pas m’entendre.

— Oh ! parbleu ! sois tranquille, a-t-il répondu, je ne t’entends pas !

J’ai trouvé cela bien cruel, je le lui ai dit avec des larmes dans les yeux. Il m’a regardée alors d’un air si étonné, si froid, si sévère, que j’ai failli m’évanouir.

— Vous ne m’aimez pas du tout, me suis-je écriée.

— Allons, a-t-il répondu, je vois bien que tu es folle.

Et il a repris son chapeau, il est sorti sans me donner la moindre assurance d’affection. Oh ! il est étrange, mon parrain ! il a les caprices d’un homme qui sent tout le monde au-dessous de lui. C’est un orgueilleux !… ou bien je lui déplais particulièrement. Il me trouve laide. C’est donc que je le suis. Si j’en étais sûre, je me tuerais !



IV

JOURNAL DE STÉPHEN. — FRAGMENTS


29 septembre

Pour la première fois, aujourd’hui, j’ai goûté l’indicible charme de mes anciennes rêveries. Loin d’elle, cela m’était im-