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Page:Sand - Theatre de Nohant.djvu/21

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FRANCINE.

Oui, vous croyez que, pour des noisettes, ils font tout ce qu’on veut, qu’ils apaisent le vent, qu’ils poussent le poisson dans vos filets, et qu’ils vous font trouver de bonnes épaves sur la grève ?

ANDRÉ.

Ça, j’en suis sûr ! C’est le drac de notre endroit qui m’a fait trouver toutes les planches de navire avec quoi que j’ai bâti notre maison et fait le mobilier, et mêmement des chapeaux neufs, des souliers encore bons et cinquante sortes de choses !

FRANCINE.

Vous l’avez donc vu, le drac ?

ANDRÉ.

Si je l’ai vu ? Plus de vingt fois ! Il avait une queue de poisson et des ailes de goëland. Voilà que tu ris encore, grande niaise !

FRANCINE.

Non ; mais, moi, je me figurais le drac plus gentil que ça !… Dites donc, mon père, c’est-il vrai que, quand ils ne volent plus sur la mer, ils ne sont pas plus malins que nous, et que, quand ils vous taquinent trop, on peut les mettre en cage ?

ANDRÉ.

Ça se dit. On dit même que le père Bosc en a pris un qui rôdait dans son garde-manger, et qu’il lui a coupé la queue pour le reconnaître. Mais c’est ça des imprudences !… C’est depuis ce jour-là que le père Bosc n’a jamais pu digérer le poisson de mer ! C’est égal, tout ce que nous disons là ne fait pas revenir mon apprenti et ma barque ; je vas descendre au rivage.

FRANCINE.

Non, tenez, les voilà ! J’entends la voix de Nicolas.

ANDRÉ, qui est retourné à la fenêtre.

Eh bien, quand je te disais ! Tiens, regarde : plus de noisettes ! Le drac est venu, le drac est content ! C’est lui qui ramène Nicolas tout de suite.