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Page:Stahl - Maroussia, 1878.djvu/151

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LE RÉVEIL D’IVAN.

cependant, il ne laisse pas d’être dur pour nous autres pauvres gens… »

Le vieux poussa un gros soupir et regarda avec mélancolie un sac en cuir qu’il tira de sa poche.

« À quoi peut mener ce bavardage ? » lui répondit maître Ivan, tout en avalant l’énorme verre d’eau-de-vie de Knich comme il eût fait une goutte de lait sucré.

Le vieux Knich poussa un autre soupir, mais cette fois, c’était un soupir capable de renverser un chêne. Toutefois, il ne raisonna plus, et, ayant tiré une poignée de cuivre de la sacoche, il commença à la compter pièce à pièce en disposant avec symétrie la monnaie sur la table.

« Voyons, es-tu capable de compter jusqu’à trois ? » demanda le soldat au paysan.

On ne pouvait certainement affirmer que cette question fût faite avec amabilité, mais le ton n’avait rien de dur ; il avait plutôt l’intention d’être plaisant, car maître Ivan s’était, tout en la faisant, versé lui-même un autre verre d’eau-de-vie, et ce n’est pas la colère qui accompagnait chez lui d’ordinaire une action de ce genre. Trouvant sans doute sa plaisanterie agréable :

« Je te demande, dit-il encore d’un air goguenard, si tu sais compter jusqu’à trois ? Comment comptes-tu, voyons !

— Vous allez voir, maître Ivan, répondit Knich.