Aller au contenu

Page:Yver - Princesses de Science.djvu/172

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
162
princesses de science

la saluait en silence, pour plus de dignité, une toilette rouge se dressa près d’elle : élégante et bien coiffée, Dina Pautel était là, qui riait de n’avoir pas été reconnue tout de suite. Et, comme Thérèse se disait troublée par la multiplicité de ces figures, la jeune mariée protesta :

— Non, non, vous ne m’aviez pas reconnue ; j’ai quelque chose de changé : c’est ma robe.

Elle prononçait : « quelqué chose » ; elle était délicieuse et exotique dans cette soie rouge, avec le flamboiement de ses yeux tendres sous ses touffes de cheveux crêpés. L’étudiante russe était loin maintenant. Avec le feutre dépourvu de garnitures et la jupe de pilou, s’en était allé son mystère de jeune « cérébrale ». Mais, dans l’amoureux marché qu’avait été son mariage, elle oubliait son sacrifice pour évaluer seulement l’apport de son mari.

— Il est là-bas, à l’autre bout du salon, dit-elle à Thérèse ; le voyez-vous, avec monsieur Guéméné et Janivot, à gauche de la cheminée ?

La jeune femme aperçut en effet la tête blonde et le lorgnon de Pautel dans un groupe de médecins où s’agitait le docteur Herlinge, très animé par une discussion avec Janivot, l’aliéniste. Artout se tenait à l’écart ; il avait entraîné dans l’embrasure d’une fenêtre le jeune Bernard de Bunod, grand garçon pâle, aux membres maigres, aux yeux fous ; et, pour détourner son attention de la doctoresse Lancelevée, que son regard ne quittait pas, il cherchait l’un après l’autre tous les potins médi-