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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/173

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princesses de science

caux à lui conter : « Ce Janivot n’était qu’un bluffeur. Sa maison de santé de Passy ne se maintenait que grâce à des prix fabuleux : soixante francs par jour, sans compter les suppléments. L’audace de cet homme avait fait sa célébrité. Au demeurant, ce n’était qu’un médicastre… »

Madame Herlinge, à ce moment, s’écriait :

— Huit heures un quart ! et Boussard n’arrive pas !

Elle s’inquiétait d’un certain risotto, enrichi d’écrevisses et de truffes, qu’elle avait elle-même surveillé et qui serait manqué si l’on ne dînait pas à l’heure. C’était une grande femme de cinquante ans, froide et distinguée, à qui ses bandeaux d’un blond fané donnaient un âge ambigu. Elle avait les yeux ternes, parlait généralement à voix basse, avec de subtils coups d’œil sur tout son salon pour s’assurer du bien-être de ses moindres invités. Elle occupait une bergère auprès de la belle madame de Bunod, femme altière, aux cheveux blancs, à la rigueur protestante. Une jeune femme en toilette sombre était assise un peu plus loin et se tenait silencieuse auprès de son mari, un cachectique d’une effrayante pâleur. Personne ne leur avait adressé la parole. Leur qualité de « clients » les isolait dans cette réunion médicale qui ne comptait que des initiés. Madame Herlinge s’aperçut de leur délaissement et fit un signe à sa fille, dont s’étaient emparées Dina et madame Lancelevée.