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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/20

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princesses de science

— Je suis trop heureux ! je suis trop heureux !

Quand il releva les yeux, Thérèse le regardait, étonnée, attendrie et nouvelle ; leurs prunelles se rencontrèrent, un moment, pour échanger d’ineffables pensées qui les lièrent plus que bien des paroles. Le bec de gaz à chalumeau lançait toujours, sous l’étuve, le sifflement de son dard de flamme. La minuscule architecture de cuivre du microscope luisait devant la fenêtre. Un fragment de cervelle humaine flottait dans un bocal, et, dans un autre, une membrane blanchâtre, produits d’une autopsie récente.

Le jeune homme parcourut des yeux ce laboratoire où la singulière fille s’emprisonnait des heures entières, pour s’astreindre à ses masculines études. Une grande fierté le prenait à la pensée que, dans cette femme en apparence toute de cerveau, il suscitait, en cette minute, par les forces de son amour, une vraie jeune fille émue et frissonnante, l’idéale compagne, sa fiancée :

— Vous ne regretterez rien, Thérèse ? demanda-t-il tout à coup.

— Je ne regrette jamais les décisions que j’ai prises, répondit-elle avec une assurance virile. D’ailleurs, je sais que vous ne me décevrez pas, mon bon Guéméné.

— Le bonheur que je vous promets sera de ceux qui durent. Si je le savais transitoire et trompeur, l’aurais-je offert à une femme telle que vous ? Mais je me demande si ce sera assez de tout mon