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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/21

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princesses de science

dévouement pour vous faire oublier l’ancienne vie. Vous la désiriez bien avidement, pour l’avoir choisie envers et contre tous, riche, belle et heureuse comme vous l’étiez. Ne regretterez-vous pas vos études, l’avenir auquel vous renoncez et qui s’indiquait si beau, cette médecine à laquelle vous preniez un si ardent intérêt ?…

— Mais, je n’ai pas besoin de renoncer à la médecine pour devenir votre femme !

— C’est pourtant ainsi que je l’entendais, Thérèse.

Mademoiselle Herlinge devint très pâle,

— Vous me demandez… vous me demandez cela ?

Un instant leur trouble les rendit muets l’un et l’autre, et ils se regardèrent avec effroi. Puis l’étudiante eut ce nouveau cri :

— Renoncer à la médecine !

— Oui, Thérèse, reprit sourdement Guéméné, je vous veux tout entière.

Elle secoua la tête avec une légère tristesse.

— Non, non ; ne me demandez pas cela : je sens, je sais, que je ne le pourrai pas. Songez que depuis soixante-dix mois j’ai donné à cette chose-là toutes mes énergies, toutes mes facultés, toute ma volonté. Mon métier est dans moi et, voudrais-je l’abdiquer, il me dominerait encore ; je suis médecin, toute, toute !

Et elle eut un geste convulsif des deux mains, comme pour retenir en soi cette subtile possession de son art, si durement acquise, si passionnément gardée.