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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/25

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princesses de science

prendre à leurs cours qu’un intérêt secondaire — une promenade par le Quartier Latin, quelques stations dans ses brasseries, nous ont vite édifiés à cet égard — et devenir, par la force des choses, des médecins très sortables. Bref, l’homme accorde à ce métier, comme à tout autre, le temps et l’intérêt indispensables, par obligation, par devoir, mais il se réserve sa personnalité vraie, que n’accapare pas la profession. La femme, au contraire, s’y noie toute, avec ses qualités, ses aptitudes, ses faiblesses, sa sensibilité, ses affections… Tenez, à ma première autopsie, dès que le bistouri eut crevé le thorax du cadavre, on entendit un bruit mou sur les dalles : c’était votre serviteur qui perdait connaissance et s’affaissait comme une loque. Parmi mes camarades, beaucoup m’ont confessé la même aventure, et il est peu de jeunes étudiants qui, au spectacle de ce dépeçage humain, n’aient éprouvé d’abord de profondes sensations d’horreur. Ça passe, Dieu merci !… Or, je vous ai vue, lors de vos débuts à la Charité, faire de la dissection ; vous aviez la main suffisamment sûre, et à la question que je vous posais vous avez répondu fièrement : « Moi ! je n’ai jamais bronché devant le cadavre !… » Le fait est que, vous autres femmes supportez généralement cette scène macabre avec flegme, et j’ai noté que peu d’étudiantes se montraient incommodées, à l’amphithéâtre. Ainsi, nerveuses, délicates et sensibles, infiniment plus que nous, les hommes, vous demeurez impassibles,