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princesses de science

deaux. Les deux hommes se regardaient et se saluaient avec mélancolie. Tous deux souffraient du même mal, celui qui sera de toute éternité l’irréductible ennemi de l’homme : l’orgueil de la femme. Puis, avec une résignation pareille d’êtres aimants, ils continuaient leur route, l’un près de cette parcimonieuse amante, l’autre tenant par la main cet enfant d’emprunt.

— Vois donc, mon chéri, dit un jour Thérèse à Fernand, comme tu étais injuste envers moi ! Je t’ai bien livré ma vie tout entière, sans réserve, sans marchandage, moi. Tu n’auras pas le sort de ce pauvre Boussard, qui n’a point l’air trop gai pour un amoureux en pleine lune de miel. La doctoresse l’a formellement déclaré : ils se verront quand ils le pourront… Oh ! c’est une maîtresse femme… Et toi qui te plaignais !

Guéméné la regarda longuement. Cette belle inconscience l’irrita. Jamais cette Thérèse ne soupçonnerait les subtiles douleurs dont elle était la cause. Avec son idéal naïf de la femme intellectuelle mariée, elle était entrée crânement dans la vie conjugale ; et, persuadée de l’excellence de ses vues, elle continuait de concilier, à travers tous les orages, ses rêves de gloire et son amour, se croyant très sage pour donner quelquefois, par habileté, plus à celui-ci qu’à ceux-là.

— Madame Lancelevée, finit-il par dire avec humeur, eut plus de loyauté que toi, voilà tout.