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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/351

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princesses de science

Thérèse quitta cette maison, l’âme dans la pire détresse. L’exercice apaisant de sa profession l’avait un moment calmée. Elle avait baigné le petit garçon ; puis, les ampoules percées, seule avec Lucie, car la mère n’était plus d’aucun secours, elle avait fait, autour du petit corps si affreusement endommagé, les pansements habiles qui le tenaient désormais droit et inflexible dans un blanc maillot d’ouate. Il demeurait certes en danger, mais elle espérait bien le sauver à force de soins. Pourtant le contentement de sa puissance, de son œuvre bienfaisante ne persista pas longtemps. À peine dehors, elle oublia Julien pour ne plus penser qu’aux poignantes confidences de la doctoresse. Aussitôt le retour sur elle-même se faisait tout naturellement :

« Comme il est aisé à une femme de perdre son mari ! » songeait-elle.

Bien qu’il fût tard, elle se sentait si nerveuse qu’elle décida de rentrer à pied. L’heure du dîner mettait une agitation excessive dans ces rues du vieux Paris, où, l’été, la petite vie bourgeoise déborde sur les trottoirs. Une fièvre poussait sur la chaussée les camions, les charrettes, les omnibus, parmi lesquels, frêles et légères, filaient des bicyclettes au grelot grêle. Thérèse se disait :

« Comme c’était bon autrefois d’être si aimée ! »

Quand elle laissa la sombre rue Dauphine et son fracas pour déboucher sur le quai, elle eut la soudaine impression d’un grand silence et d’une grande