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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/358

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princesses de science

Guéméné. Cet enfant représentait pour lui l’autre amour dont il avait été frustré, et il satisfaisait ses désirs paternels à s’occuper du fils de son amie, à surveiller ses études, à diriger sa vie. Il avait conseillé que l’on prit pour lui une Allemande. À son insu, il aimait faire acte d’autorité dans cette maison qui était pour lui un foyer illusoire, à gouverner l’enfant, à régenter la mère.

Il examina les pages du cahier, fit quelques observations que le petit garçon écouta docilement, puis il dit :

— Quand tu auras très bien travaillé, je te conduirai une fois à mon laboratoire où tu verras toutes sortes de petites bêtes.

L’enfant demanda, de son soprano aigu :

— Y aura-t-il des lézards ?

Guéméné se mit à rire, l’enleva, l’assit sur son genou, l’enlaçant d’un bras, le serrant âprement. La mère poursuivait sa broderie et les regardait d’un œil oblique. Ils demeuraient silencieux tous les trois, dans un bien-être paisible, confiants les uns dans les autres. Et Guéméné se complaisait à ce simulacre d’une famille auquel il se leurrait par instants.

— Votre cuisine sent bon, dit-il tout à coup d’une voix très émue. Invitez-moi donc à dîner.

Madame Jourdeaux tressaillit et se redressa :

— Vous voulez dîner ici ?

C’était la première fois qu’il en manifestait l’envie. Pour elle, qui l’avait toujours reçu si tendre-