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Page:Yver - Princesses de Science.djvu/367

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princesses de science

se sentait faiblir, les enviait, souffrait, retenait ses larmes.

Elle soignait le petit Adeline avec un zèle acharné, se rendant deux fois chaque jour rue de Buci pour les pansements, les bains, la morphine. La morgue légère qu’elle montrait autrefois envers la pauvre Jeanne Adeline, si triviale avec sa vulgarité de sage-femme populaire, s’évanouissait dans un sentiment d’égalité douloureuse. Ce lui fut une compensation à tout ce qu’elle endurait que de rendre à cette mère son enfant.

Mais, de retour à la maison, elle retrouvait le compagnon déloyal dont le cœur recélait un mystère, et le chagrin de Thérèse prenait une autre forme de rancune, de colère, qui, devant son mari, l’angoissait, l’étouffait.

Pourtant sept jours s’étaient écoulés, et, dans l’obscurité du silence qui pesait entre eux, elle s’acharnait à chercher, soupçonneuse et nouvelle, des indices de la vérité. Sa délicatesse fière répugnait aux reproches, aux injures, aux scènes. L’élévation morale de ces deux êtres faisait leurs ententes muettes plus tragiques, plus poignantes que les explications. Parfois, à table, Fernand devinait sur lui le regard de sa femme qui le sondait. Elle était, dans son chagrin morne, si grande, si offensée, qu’il se sentait lui-même amoindri, humilié. La réserve qu’elle gardait faisait la force de Thérèse. Lui tenait dans le drame le rôle inférieur.