Page:Yver - Princesses de Science.djvu/56

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
46
princesses de science

De la chambre venait un gémissement rauque, une plainte longue, angoissante, qui finit dans un cri.

— Allez-y, monsieur Fernand, allez-y ! murmura la vieille femme alarmée ; si c’était un nouveau malheur !…

Et, ingénument, elle le poussait de la main. Le jeune homme hésitait. Pourtant on ne pouvait laisser sans secours le malheureux dont la plainte avait peut-être été un appel. Mais un respect, une épouvante sacrée défendait le seuil de la chambre mortuaire. Est-ce que l’homme qui s’y était enfermé avec sa femme morte n’avait pas le droit d’y hurler sa douleur, seul, sans la honte d’être épié et entendu ?

— Il s’est tué ! murmura la vieille servante, il a crié comme pour mourir…

Cette expression donna au jeune homme un frisson ; elle vainquit sa pudeur. Il fit quelques pas, toucha du doigt le bouton de la porte, puis s’arrêta de nouveau pour écouter. Dans la pièce, le silence semblait absolu. Il frappa sans obtenir de réponse.

— Mon maître ! mon maître ! fit la vieille Marianne affolée.

Et, résolument, elle ouvrit la porte.

Sur le lit de parade aux draps sans plis, la morte déplacée, attirée de côté, sèche et légère dans son attitude rigide, avec ses doigts comme sculptés, qui ne s’étaient point désenlacés, laissait pendre sa tête de cire aux cheveux gris. Et lui, qui une dernière fois avait voulu l’étreindre, était retombé